Le Québec bashing est en quelque sorte devenu symptomatique chez plusieurs journalistes et chroniqueurs anglophones. A défaut de trouver une argumentation élaborée, il leur arrive d’associer les francophones et les souverainistes à des intégristes, des fascistes, ou encore à des xénophobes. À titre d’exemple, Barbara Kay de The Gazette a déjà comparé les intellectuels québécois de gauche (dont Pierre-Elliot Trudeau) à des sympathisants des causes antisémites, antiaméricaines, ainsi que du groupe terroriste Hezbollah.
Le cas le plus récent porte sur le projet de loi 14. L’article de Ben Reedjik publié dans la section anglaise du Bouillon Politique fait allusion à des idées fréquentes et typiques du Québec bashing.
1. Le but détourné du Parti Québécois (PQ) est de combattre le bilinguisme au Québec.
Plusieurs journalistes prétendent que le PQ en veut au bilinguisme et prennent pour récent exemple le projet de Loi 14. Dans les faits, l’accès des francophones et allophones aux Cégeps anglophones pourrait s’avérer plus difficile, car il leur sera demandé d’effectuer un examen de français afin de s’assurer d’une maîtrise suffisante de la langue de Molière avant de pouvoir continuer leur parcours académique dans une autre langue. Sans compter que, de manière générale, le PQ souhaite plutôt favoriser la maîtrise des deux langues pour tous ceux qui auront complété un diplôme d’études collégial: le même projet de loi exige désormais aux Cégeps francophones de renforcer l’enseignement de la langue anglaise afin d’en assurer une maîtrise fonctionnelle.
2. Le PQ mène une rhétorique antianglophone vis-à-vis des villes bilingues.
Contrairement à ce que certains tels que Ben Reedjik le font comprendre, le PQ n’interdira pas le statut bilingue aux villes. En vérité, le PQ se gardera le droit de retirer le statut bilingue d’une ville ayant une population anglophone inférieure à 50%. Cela vient en fait répondre aux transformations sociodémographiques des dernières décennies: certaines villes dotées d’un statut bilingue continuent à tout traduire dans les deux langues alors que la population anglophone est relativement très faible (6,8% d’anglophones dans le cas d’Ottenburn Park, ville à statut bilingue). Il s’agit d’une mesure déjà en plusieurs provinces canadiennes, mais bien entendu nous ne les taxerons d’avoir une rhétorique antifrancophone.
3. Les propos xénophobes de certains Québécois sont reflétés dans la politique québécoise.
Il est vrai que les Québécois francophones sont inquiets du fait que leur langue et leur culture pourraient disparaître. D’ailleurs, selon Léger-Marketing, près de 90% d’entre eux estiment que la langue française est menacée sur l’île de Montréal. De manière impressionnante, ce sondage met également en avant à quel point les comportements nuisibles de certains francophones à l’égard des anglophones restent minoritaires comparativement à la proportion d’individus exprimant cette inquiétude.
Les partis politiques québécois ne font pas dans le discours xénophobe comme certains partis européens. Au contraire, ils expriment le désir de défendre une culture fragile participant à la diversité culturelle du monde. Ces mêmes partis tiennent aussi compte du fait que le Québec fait partie d’un espace géopolitique dominé par la langue anglaise et vivant au côté du géant américain. À titre comparatif, les nations européennes de la taille du Québec font partie d’un ensemble géopolitique comprenant plus de 27 langues et ou les fédérations multilingues comme la Suisse et la Belgique se dotent de politique linguistique territoriale très stricte.
4. Il faudrait plutôt une politique faisant la promotion de la culture francophone, imposant la présence du français dans l’espace public et favorisant l’implantation de cours de français subventionnés par l’Etat.
Statiquement parlant, aucun Etat d’Amérique du Nord n’aura autant fait la promotion de sa culture et de sa langue depuis les années 1960 (par rapport à sa population), et ce, à travers le monde. Aucun État non souverain n’est d’ailleurs autant reconnu sur la scène internationale. De plus, le Québec impose déjà la présence du français dans l’espace public, parfois même trop aux yeux de certains. Le Québec offre également des cours de francisation subventionnés à même les fonds publics. Toutefois, le Parti Libéral du Québec, considéré comme un champion du bilinguisme, a amputé de plus de 5 millions de dollars ces cours de francisation, lors de son dernier mandat. Le PQ souhaite bientôt être en mesure d’y réinvestir les fonds nécessaires.
Est-ce que cela veut dire qu’il ne faut pas débattre des projets de lois linguistiques imposés par le PQ?
Bien sûr que non, aucun parti politique ne peut se targuer de connaître la recette miracle afin d’assurer à la fois la pérennité de langue française au Québec et la paix linguistique. Par exemple, il serait juste de dire que le projet de loi 14 présente des failles et des incongruités: est-il nécessaire de se donner le droit de retirer le statut bilingue d’une ville ayant une population anglophone inférieur à 50%? Le ministre du PQ, Jean-François Lisée, a lui-même déclaré qu’il sera possible de revoir à la baisse cette balise paraissant arbitraire et circonstancielle. Ou encore, pourquoi 40% des allophones ayant une connaissance insuffisante du français ne profitent-ils pas des cours de francisation offerts par le gouvernement du Québec?
En conclusion, il est nécessaire d’éviter d’entrer dans la caricature et le dénigrement lorsque nous traitons de sujet aussi sensible que la question de langue, sans quoi aucun débat constructif ne pourra émerger. Le seul impact que cela pourra avoir à long terme sera d’accentuer la perception grandissante des francophones voulant que les anglophones n’ont aucune compréhension de leurs aspirations.
- Pier Alexandre Lemaire
(Image à la une: par caribb, Creative Commons, Flickr)
Bonjour Mme Houde,
je crois qu’il serait très pertinent pour l’objectif de votre commentaire de nous faire part de ces articles francophones pratiquant le Canada bashing, je n’ai malheureusement jamais eu l’occasion d’en voir.
En ce qui concerne le projet de loi 14, vous avez tous les droits de vous y opposer, il aurait toutefois été intéressant de lire vos arguments et non seulement votre désarroi, sinon on ne peut pas faire grand chose avec ce type de commentaire…
Cordialement
Bonjour,
A l’inverse il faut aussi d’éviter de tomber dans cette caricature du « Quebec Bashing » par les « anglophones » dont nous entendons régulièrement parler. Il y a beaucoup de généralités dans ce type de discours,
Par exemple contrairement à ce que laisse présager l’article et le discours de certains, ce ne sont pas les « anglophones » qui ont dénoncé le projet de Loi 14 mais aussi un très grand nombre de francophones, incluant moi même. Sans entrer dans les détails, pour moi il s’agit d’un projet de loi non pas pour promouvoir la langue francaise mais un premier pas dans une très mauvaise direction où on veut dicter ce qu’est un vrai québécoiset voir même exclure ce qui ne rentrent pas dans le moule (ex. le projet de citoyenneté québécoise proposée par la PQ encore avant les élections dans lequel on enlevait des droits politiques, tels le dépôt d’une pétition à l’AN ou faire un don à un parti, à une partie de la population.
Bref, il ne s’agit d’un débat de société et non pas d’un débat dépassé « franco vs anglo ». De nombreux francophones veulent revoir en entier cette problématique linguistique et trouver les meilleurs systèmes et politique à mettre en place, dans le contexte dans lequel nous sommes aujourd’hui en 2013. Malheureusement à mes yeux, le PQ veut agir comme si nous vivions toujours en 1980.
Similairement les termes comme « extrémiste » et « xénophobe » ne sont pas toujours diriger vers l’ensemble des gens en faveur de la séparation. Ils ne sont pas non plus lancer par les « anglophones » mais encore une fois par de nombreux francophones. Je sais que personellement, quand je regarde les articles sur le site Facebook de Québec Francais, ca me donne quelques frissons dans le cou. Ca fait peur de voir autant de haine, de peur et de fermeté d’esprit provenant d’un groupe qui fait la promotion d’une certaine suprémacie. Quebec Francais n’est pas encore au niveau du KKK… mais ils sont nettement dans leur direction.
Bref tout ca pour dire qu’il s’agit d’un débat de l’ensemble de la société québécoise et non pas de simples critiques des anglophones. Les québécois ont débatu du projet de loi 14 et les québécois, représentés par un gourverment très majoritairement francophone, l’ont placé sur la tablette.
Bien cordialement.
Bonjour Pascal,
merci de votre commentaire. Tout d’abord, je ne parle pas des « anglophones », mais de « plusieurs journalistes et chroniqueurs anglophones », les nuances sont importantes pour ne pas tomber dans les caricatures et la généralité comme vous le dites.
De plus, critiquer un projet de loi est une chose, mais laisser sous-entendre
la xénophobie en est une autre, c’est pourquoi je fais le lien en début d’article avec un papier écrit par un de mes collègues.
Aussi, je ne cherche pas ici à défendre le projet de loi en soi, mais à faire un débat plus raisonné, en mettant en relation avec celui des exemples européens tels que la Belgique. Lorsque j’ai habité à Vancouver, j’ai vite compris que mes droits linguistiques étaient inexistants, sauf peut-être sur mes emballages de croustille (figure de style). Les droits linguistiques anglophones au Québec sont parmi les mieux protégés au monde et la majorité des intellectuels canadiens le reconnaissent aussi.
Cordialement
The Political Bouillon est le seul journal-web indépendant et bilingue qui rejoint et fait participer les universités McGill et Concordia.
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LA PLUPART DU TEMPS C’EST PLUTÖT DU CANADA BASHING. Le Quebec Bashing est très bien mérité et les anglos ont souvent raison. Si seulement ces Québecois qui nous rendent la vie difficile regardaient autre chose que leur nombril ca irait mieux IÇI!
Le projet de loi 14 est inacceptable et odieux et oui les souverainistes sont des intégristes, des fascistes, des xénophobes, c’est claire comme de l’eau, excepté qu’ils se voient tous d’une lumière autre que ce que nous observons de leur mentalité régionale et leur comportement centriste.
Les anglos quittent le Quebec dû au risque de séparation et l’injustice envers leurs droits linguistiques. Je ne les blame pas. En ’95 plus de 280,000 on quitté le Québec.
J’AI SOUVENT HONTE D’ÊTRE QUÉBECOISE. J’espere que le PQ disparaitra de la mappe un jour. Ils sont en train de mettre le Québec à terre et de nous faire honte à travers le monde entier. CHU PU CAPABLE! http://www.quitterlequebec.com/